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Tous ont quitté le bon chemin

Le passage du samedi matin dans le office du jour (Romains 3:9-20) énumère tout un catalogue d’accusations que différents auteurs de l’Ancien Testament ont rassemblées contre les païens.  Ici, l’auteur les applique à tous les chrétiens romains qui entendent ou lisent la lettre – juifs et grecs également – comme preuve de la nécessité de s’appuyer, non pas sur notre « meilleur comportement », mais sur la bonté de Dieu.

«Il n’y a pas d’homme juste, pas même un seul,
il n’y a personne qui comprenne,
personne qui recherche Dieu.
Tous ont quitté le bon chemin, ensemble ils se sont égarés.
Il n’y a personne qui fasse le bien, pas même un seul.
Leur gorge est comme une tombe ouverte,
leur langue leur sert à tromper,
c’est du venin de serpent qui sort de leurs lèvres,
leur bouche est pleine de malédictions amères.
Ils courent à toutes jambes pour assassiner,
ils laissent la destruction et le malheur partout où ils passent,
ils n’ont pas connu le chemin de la paix.
Ils vivent sans aucune crainte de Dieu.»
Romains 3:11-18

Depuis quelques mois, notre culte dominical à 8 heures du matin comprend la liturgie de la prière du matin du Recueil des prières. Nous commençons par réciter la Confession ensemble : « …nous avons fait ce que nous n’aurions pas dû faire, et il n’y a pas de santé en nous… »

Comment cette prière, chaque semaine ou même chaque jour, peut-elle faire partie de la Bonne Nouvelle ? Eh bien, c’est certainement une bonne nouvelle que nous puissions prononcer ces mots devant Dieu sans être foudroyés ! Nous n’avons pas été bannis de la présence aimante de Dieu. Au contraire, on nous offre l’occasion de reconnaître nos manquements en toute humilité. D’espérer retrouver la santé spirituelle.

Ce thème est approprié, à la fin d’une semaine où, plus tôt, nous nous sommes réunis sur Zoom pour discuter de la question des vies des noires – et où certains points de l’histoire de notre paroisse ont été portés à mon attention.

Frank Dawson Adams-un géologue montréalais et un universitaire de renom- a publié son histoire de cette cathédrale en 1941. Avec une rigueur scientifique, il inclut comme contexte la plus ancienne histoire du Montréal anglais, et comprend de nombreux éléments provenant de sources primaires. La paroisse qui est devenue Christ Church (plus tard la cathédrale) a commencé par un culte organisé dans la garnison britannique de Montréal avant même que le Canada ne soit cédé à la Grande-Bretagne dans le traité de Paris en 1763. L’esclavage était à cette époque encore légal tant dans le Haut-Canada que dans le Bas-Canada.

Voici quelques faits concernant l’implication de notre église dans l’esclavage à cette époque.

Certaines des familles anglaises de Montréal étaient propriétaires d’esclaves. Elles amenaient leurs esclaves pour les faire baptiser et parfois les marier à l’église ou pour faire enregistrer leurs mariages.

Le recteur de la paroisse et aumônier de la garnison, le révérend David Chabrand Delisle, a payé 20 £ en 1780 pour acquérir un esclave noir nommé Charles qui avait été amené à Montréal depuis la vallée Mohawk de New York avec un groupe d’autres esclaves noirs et indigènes.

Que faisons-nous de ces faits ?  Vous surprennent-ils ? Vous troublent-ils ? Il est trop facile de se dire que nous sommes meilleurs aujourd’hui.  Je pense à ce croyant de Luc 18, représenté par l’icône en haut de cette réflexion, qui prie « Dieu, je te remercie de ce que je ne suis pas comme les autres : voleurs, voyous, adultères, ou même comme ce percepteur ici…  » .  Jésus nous appelle à avoir plus d’amour – et non plus d’opinions.

Dans le livre de Pema Chodron « When Things Fall Apart » , dont certains d’entre nous discutent le mercredi, elle écrit sur le danger de s’accrocher à des opinions qui nous piègent à rester agacés, et ainsi perpétuent en fait un cycle d’agression.  Si nous prenons un moment pour nous en tenir aux faits que nous avons devant nous – sans nous laisser envahir par la répugnance ou le blâme, ni éviter les souffrances humaines que cela implique, nous pourrions aller un peu plus loin. « Il est important de voir la souffrance comme une souffrance. Il ne s’agit pas d’ignorer ou de se taire. Si nous ne sommes pas emportés par notre indignation, nous verrons alors plus clairement la cause de la souffrance. C’est ainsi que la cessation de la souffrance évolue ». Pour combattre le racisme systémique, comme d’autres formes de péché structurel, nous avons besoin de la discipline d’être constamment conscients – pour amener notre curiosité et notre conscience à la tâche.

 

Références :

Frank Mackey, Done With Slavery : The Black Fact in Montréal [1760-1840]. Montréal : McGill-Queen’s University Press, 2010. 384-388

Frank Dawson Adams, A History of Christ Church Cathedral, Montréal. Montréal : Burton’s Ltd, 1941

James H. Lambert, « CHABRAND DELISLE, DAVID », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 juin 2020, http://www.biographi.ca/fr/bio/chabrand_delisle_david_4F.html.

De nombreux Canadiens croient que ce pays est celui où les esclaves sont venus trouver la liberté. Mais avant que « le chemin de fer clandestin »  n’existe, les esclaves canadiens s’échappaient vers l’État de New York où l’esclavage était illégal avant d’être rendu illégal ici. Vous pouvez en savoir plus sur l’esclavage en Nouvelle-France ici.

 

 

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